J’aimerais pouvoir dire que tout est derrière moi. Que mes silences arrachés, mes mots criés, m’ont libérée de lui. Mais la vérité est plus nuancée, plus complexe. L’amour, même dans ses formes les plus toxiques, ne s’efface pas en un instant.
Je le vois encore dans mes souvenirs, dans des éclats d’instants tendres, des rires, des regards qui semblaient si sincères. Je l’entends dans les mots qu’il murmurait, ces mots qui me portaient, même s’ils me brisaient à la fois.
Et c’est là toute ma bataille : ne pas me laisser séduire à nouveau par ce mirage.
Parce qu’aimer quelqu’un qui vous fait du mal, c’est une lutte constante.
C’est un champ de bataille intérieur où se confrontent les émotions et la raison, les souvenirs et la réalité.
Je ressens encore cet amour, profondément ancré, presque comme une partie de moi. Et pourtant, je sais que cet amour ne peut vivre. Parce que l’amour, le vrai, ne blesse pas, ne manipule pas, ne détruit pas.
Alors, pourquoi me manque-t-il ?
Pourquoi cette envie irrationnelle de croire que, peut-être, il pourrait changer ?
Pourquoi ce vide que je ressens chaque fois que je pense à lui, ce manque qui me transperce ?
C’est là que la conscience devient un poids, une ancre douloureuse mais nécessaire.
Je sais que ses actes, ses colères, ses manipulations ne disparaîtront pas. Je sais que croire à une autre version de lui serait m’aveugler, m’abandonner à un cycle sans fin.
Mais cette lucidité n’apaise pas la douleur. Elle amplifie même parfois le chagrin. Parce qu’aimer quelqu’un que l’on ne peut plus aimer, c’est comme porter une flamme qu’on ne peut laisser s’éteindre, mais qu’on ne peut approcher sans se brûler.
Je suis triste. Triste pour ce que nous étions, ou ce que j’espérais que nous pourrions être. Triste pour cet amour qui ne trouve plus d’espace où respirer, pour ces rêves qui se brisent à chaque fois que la réalité me rappelle son emprise.
Tourner la page est un acte de survie. Mais ce n’est pas un acte sans douleur. Chaque jour, je dois me répéter que cet amour n’a pas sa place, que ses gestes ne changeront pas, que ses mots, aussi beaux soient-ils, ne suffisent pas.
Et pourtant, malgré tout, l’écho persiste. Cet écho de ce que j’ai aimé, de ce que je ressens encore parfois. Un écho qui me murmure d’y croire, alors que ma conscience me hurle de m’en détacher.
Alors, j’écris.
J’écris pour ne pas sombrer. Pour offrir un exutoire à cette douleur, un espace où elle peut exister sans m’étouffer. Parce que je sais que je ne peux pas enterrer cet amour comme s’il n’avait jamais existé.
Mais je sais aussi qu’il ne peut continuer à vivre.
Je tourne la page, non parce que je n’aime plus, mais parce que je m’aime assez pour m’éloigner.
Alors, je roule. À moto, le vent sur ma peau, tout me paraît vide, dénué de sens. Seule la bataille intérieure me maintient en mouvement, me donne l’illusion d’être vivante. Mais cette lutte est épuisante.
Si je relâche un instant cette tension, si je m’apaise, ces sentiments interdits, ces souvenirs que je tente d’oublier, s’abattent sur moi comme un orage. Ils me saisissent à la gorge, m’étouffent, et transforment cette promenade en un espace aussi vide que le reste de ma vie.
Cette situation m’oppresse. Je tiens, mais je peine. Je souffre.
Alors, j’oblige mon esprit à chercher la lumière, à m’y accrocher comme à une bouée. Parce que si je baisse les yeux, si je regarde trop longtemps cette obscurité en moi, je crains de ne pas pouvoir remonter.
Pour l’instant, je roule. Et quand la route ne suffit plus, j’écris. Parce que, quelque part entre le vent et les mots, j’essaie de me retrouver.
Et peut-être qu’il n’y a pas vraiment de fin.
Peut-être que tourner la page ne signifie pas oublier, mais apprendre à vivre avec ce vide, à respirer malgré le poids des souvenirs.
Je ne sais pas encore comment faire.
Je ne sais pas encore si c’est possible.
Mais pour l’instant, je continue d’écrire, comme on souffle sur une plaie, espérant qu’un jour, elle guérisse.
Alors, je dois repartir. Ne pas m’arrêter là, où ces sentiments m’appellent. Rouler, malgré tout. Ailleurs. Résister aux appels de ces souvenirs qui me hantent.
Exister. Vivre, même dans la douleur. Tenir. Et un jour, me reconstruire.
Pour elle, avec elle, autant abandonné que moi, je réussirais la pire épreuve.
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